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DE LAPURDUM A BAYONNE CONTEMPORAIN

 

L’ouvrage de P. HOURMAT, Président de la Société des Lettres, Sciences et Arts de Bayonne, intitulé "Histoire de Bayonne des origines à la Révolution française" (1986), nous éclaire de façon saisissante sur la vie du mot "Bayonne". En l’associant à quelques autres sources, nous pouvons établir un condensé :

 

Le pays de Labourd (qui ne fut jamais une "province", pas plus que la Soule ou la Basse-Navarre) est cité pour la première fois, avec sa capitale LAPURDO, dans un document, la "Noticia Dignitatum", à la fin du IVème siècle. Le nom LAPURDO semble n’avoir jamais reçu d’explication satisfaisante.

 

M. HOURMAT relève l’expression "decimam portus Baionensis" (1098) et nous rappelle (op. cit. p.40) que, jusqu’à la fin du XIIème siècle, "épiscopus Baionensis" et "épiscopus Laburdensis" alternèrent ; "Sancta Maria Baïonensis" était apparue en 1105.

 

Il est intéressant de noter l’emploi, dans le "Livre d’Or" (1) - notre plus ancien document local - puis l’évolution du nom de Bayonne.

 

Dans son "Avertissement", en tête du document imprimé, l’abbé Dubarat signale :

 

"quelques mots et beaucoup de tournures de l’idiome vulgaire ... se sont introduits dans les phrases latines, comme, par exemple : ... ecclesie beate Marie de Baiona, ...". Ce qui montre que pour le "vulgarisateur" du Livre d’Or, "Baiona" était du "patois landais qu’on a baptisé gascon maritime".

 

De fait, ce document de base étant écrit seulement en latin et en gascon, "Baïona" est bien "du gascon" ou adopté par le gascon. Le mot devait se prononcer comme maintenant, "Bayoune".

 

Remarquons en passant que M. LUCHAIRE, linguiste de grand renom, écrit dans son ouvrage "Etudes sur les idiomes pyrénéens" : "les patois du Labourd gascon (sic) appartiennent au dialecte landais" et plus loin (page 265) : "... depuis le XIIIème siècle certainement, et peut-être depuis le XIIème, les particularités dialectales du patois de Bayonne et de la Région du Bas-Adour ont été toujours les mêmes qu’aujourd’hui".

 

"Baiona" se trouve déjà dans des textes en latin de 1063 - 1105 puis d’"avant 1142", mais dans un autre texte en latin de la même époque on relève un "Baione" (avec un "e" à la fin) comme par la suite en 1150 - 1170 - 1193 - 1199 - en 1203, et comme, plus tard, dans les textes en gascon.

 

Le nouveau nom s’est substitué définitivement à Lapurdum ... vers la fin du XIIème siècle, au moment où le vicomte de Labourd (révolté, vaincu par Richard Coeur de Lion) dut renoncer à sa résidence de Bayonne pour s’installer à Ustaritz (1177).

 

Toutefois, Eugène Goyheneche, dans sa thèse sur "Bayonne ... du XIIème au XVème siècle", pense : "Plus probablement, Lapurdum n’a jamais désigné qu’un territoire, le Labourd actuel ; quand Bayonne a pris de l’importance, son nom a fini par s’imposer dans les textes" (p. 73).

 

On écrivit BAYONA en 1248, BAYONE en 1249. La prononciation était sans doute la même (BAYOUNE), et il est curieux de constater que les gascons ont préféré ensuite écrire dans leur langue "BAYOUNE" (1), tandis que "BAIONA" a été adopté par les Basques. Le retour aux règles anciennes et la diffusion d’un occitan normalisé ont restitué BAIONA aux deux langues "d’origine" de notre région. Mais en gascon la prononciation demeure "BAYOUNE".

 

Le sens ? P. HOURMAT nous dit : "l’étymologie du mot avance deux hypothèses. L’une fait de BAIONA un augmentatif gascon du latin ou roman "baia" = baie (celle de cette vaste étendue d’eau qui, à la confluence, forme ce qu’on a appelé longtemps la "gran mar" de l’Adour (en gascon : grande mer). L’autre explique le même mot par le basque "ibai-ona" = bonne rivière.

 

Le chanoine NARBAITS (le Matin Basque, p. 33), y voit plutôt le sens de "confluent", "lieu de rivière". Mais ne postule-t-on pas, dans cette dernière hypothèse, que BAI = IBAI ? Explication qui paraît peu convaincante au spécialiste basque Jean ESPILONDO, dans "Armorial de Bayonne, Pays Basque et Sud Gascogne" de Lamant et Régnier (Tome 2, p. 16).

 

Dans une formule claire et synthétique, P. HOURMAT définit ainsi sa ville : "Bayonne ... place forte frontalière, port maritime et fluvial, ville épiscopale et religieuse d’un diocèse de population en majorité basque, ville de tradition et de langue gasconnes ...".

 

Encore faut-il bien noter la distinction entre la Ville et le diocèse dans le texte précité, l’évolution du diocèse (qui est actuellement "de Bayonne, Lescar et Oloron"), la répartition des populations selon le dernier recensement officiel (cf. Annexe), l’importance du District Bayonne, Anglet, Biarritz et du Val d’Adour dans l’arrondissement de Bayonne (sensiblement la moitié de la population).

 

Et l’on peut ajouter cette notation d’Eugène Goyheneche dans l’Avertissement, daté 1986, de son ouvrage déjà cité, page 8 :

 

"Bayonne est la capitale d’une région, le Bas-Adour, avec les trois "provinces" (2) basques et une partie de la Gascogne ; ...."

 

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Un détail remarquable, qui peut expliquer certaines choses dans l’Histoire de Bayonne (ce qui n’est pas notre sujet), mais aussi dans les raisons de l’attribution de ses toponymes : si la Ville se trouve actuellement presque sur les bords du Golfe de Gascogne (à 4 kilomètres) les avatars de l’embouchure de l’Adour, au milieu des sables, et pendant plus de trois siècles dont l’histoire est bien connue, les sinuosités du cours du fleuve en Aval de Bayonne, avaient placé la cité, au Moyen Age, entre 18 et 40 kilomètres de l’Océan ....

Une autre précision de détail, qui a échappé à certains historiens : à la suite de l’intervention de Richard Coeur de Lion séparant Bayonne de la Vicomté de Labourt, le maire était nommé par le roi et portait pour cette raison le titre de "Gouvernedor l’Offici de le maiorie de Baionne" - D’où, ici ou là, l’indication d’une décision du "Gouverneur de la Ville".

 

 

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